lundi 8 décembre 2014

Marre des rencontres de taverne ? Testez les scènes d'introduction !

C'est parti ! Joueurs et MJ (meneur de jeu - celui qui met en scène la partie) ont réussi à se trouver, à se mettre d'accord sur des dates, sur un jeu. Les personnages sont créés, les chips et le coca sont sur la table, la campagne peut enfin démarrer. Positionné derrière son écran, le MJ décrit la première scène.
Grescus et Zanath, vous aviez une petite soif, et vous êtes en train de boire au comptoir du Sanglier malade. Pobran, tu vas à la taverne parce que tu penses que tu y trouveras des alliés pour délivrer la princesse. Megoas, tu traînais dans le coin, et t'avais besoin de houblon pour un composant de sort... 
Cette scène ne vous rappelle rien ?
Une première rencontre typique entre personnages-joueurs
En tant que metteur en scène de la partie, vous aimeriez bien sortir du cliché de la rencontre dans la taverne, mais ce n'est pas toujours évident. Après tout, c'est un lien facile à établir entre tous les types de personnages. Que l'on soit barde, informaticien, contrebandier ou même archer elfe, il y a toujours un moment dans notre vie où on s'installerait bien prendre une petite mousse (ou un café) à une terrasse ou près de la cheminée (selon la météo). Alors que pour les faire se rencontrer dans une bibliothèque ou dans les tribunes de la Beaujoire, ça va être un peu plus chaud : vous imaginez déjà vos joueurs vous rappeler que leur personnage est analphabète ou qu'il déteste le football...



Heureusement, et là je suis en train d'enfoncer des portes ouvertes, vous avez sûrement la parade pour votre campagne. Et je ne parle pas de l'employeur pour une mission mystérieuse ou du voyage dans le même train. Vous avez tout simplement l'idée de commencer la campagne avec des PJ (personnages incarnés par les joueurs) qui se connaissent déjà, charge aux joueurs d'intégrer dans leur historique des raisons qui ont pu les faire se rencontrer, s'apprécier, voire travailler ensemble. Très bien, il n'y a plus qu'à s'arrêter là, l'article est terminé, votre campagne ne va pas commencer par une pinte et une bagarre dans une taverne...


En fait, si, je vais continuer un peu. Pour la bonne raison que cette réponse n'est pas idéale, car elle génère une difficulté d'interprétation : les personnages se connaissent depuis longtemps, mais les joueurs, eux, ne connaissent pas les personnages des autres, et pas encore vraiment le leur. Ce n'est pas si aisé, à froid, de simuler une relation existante, et ça se ressent souvent autour de la table. Comme j'ai utilisé personnellement les scènes d'introduction, et que ça a été efficace, c'est le moment de vous présenter mon astuce.

Les scènes d'introduction

Commençons par ma problématique. J'ai commencé à mener la campagne officielle d'Yggdrasill il y a quelques mois. Avant la séance de création des personnages, j'ai entrevu une grosse difficulté : il n'y a pas de taverne dans  Yggdrasill est un jeu de rôle historique (même s'il intègre des éléments mythiques), et d'un pan de l'histoire très peu connu des joueurs. Incarner un Scandinave du Ve siècle n'est pas évident, et il est rapide de faire un faux pas ou d'avoir un comportement anachronique.  Étant du même clan, tous les PJ se connaissaient, mais pas forcément beaucoup, et je ne voulais pas perdre l'idée que la campagne serait leur première aventure commune. J'ai donc écrit des scènes d'introduction pour leur faire jouer à la fin de la séance de création des personnages.

Voici ce qui selon moi définit une scène d'introduction :
  • Au minimum 2 PJ sont impliqués, mais il n'est pas nécessaire que tous les PJ soient présents ;
  • 30 minutes maximum, on ne peut faire plus long que si tous les PJ sont présents ou si on fournit un personnage aux joueurs des PJ absents ;
  • un scénario sans enjeu majeur, reflétant le quotidien des PJ et permettant aux joueurs de bien s'approprier l'univers de la campagne.
L'idée est bien entendu d'enchaîner les scènes d'introduction pour faire vivre tous les personnages, et de leur montrer des contextes différents : politique, religion, famille... C'est le moment de guider les joueurs sur ce que peut penser un personnage de l'époque de tel ou tel sujet, ils apprendront par la pratique et seront ensuite plus à l'aise. On peut également leur glisser par ce biais les éléments que leurs personnages savent et dont ils auront besoin dans la campagne. Par exemple, si résoudre une énigme implique une connaissance familière aux personnages, mais pas aux joueurs, il est préférable d'avoir introduit cette information longtemps avant plutôt qu'au moment de présenter l'énigme, ce qui oriente forcément leur réflexion et en facilite la résolution.

Des scènes d'introduction pour Yggdrasill

Voici les scènes d'introduction que j'ai utilisées pour la campagne officielle. Les PJ sont - pour simplifier - les prétirés du livre de base Jorunn, Hildr, Sigurdr, ainsi qu'un forestier du nom de Vigil.

Le tirage de runes

Une scène évidente consistait à faire jouer le tirage des runes de Jorunn. Ayant fait effectuer les jets au joueur par anticipation, j'ai pu écrire un texte correspondant à l'interprétation faite par la völva, et le fournir à sa joueuse avant la séance. Le texte comprenait également les éléments dévoilés dans le background des deux personnages (à lire sur le livre de base).

Dans la forêt...

Le printemps vient vraiment d’éclore. La forêt est pleine de chants d’oiseaux, les feuilles commencent à sortir. Hildr profite de la douceur printanière (et puis que l’armoise est bien poussée) pour aller chercher des herbes. Et tandis qu’elle fouille un buisson, elle remarque un lièvre pris au piège, encore vivant. Que fait-elle ?

Vigil n’est pas très content : cela fait déjà deux fois qu’il constate, en relevant ses collets, que quelqu’un est passé avant lui. Et il aimerait bien mettre la main sur ce saligaud ! Justement, il entend du bruit, en plus le voleur ne cherche pas à être discret ! Bref, Hildr et Vigil se rencontrent, explications…

Selon ce qu’ils décident de faire (ou pas), soit ils trouvent piste du gars, ou lui tendent piège, ou bien il fait trop de bruit en prenant la fuite dès qu’il a repéré qu’il y avait du monde dans la forêt. Le voleur est Gnor Ygnarsson (figurant de type paysan), un membre du clan Arnkel un peu solitaire qui a repéré le bon plan lors de ses errances dans la forêt. S’il est capturé, il sera facile à convaincre de dire la vérité, sinon, Hildr et Vigil le verront se diriger vers le clan Arnkel (décrit dans le scénario indépendant du supplément Les 9 mondes). Ils auront eu le temps de lui voir une belle balafre rouge le long du visage.

Gnor Ygnarsson est un simplet qui vit avec sa mère dans la forêt assez loin de Gunnvor, et près de la frontière avec le clan Arnkel. Gnor n'a aucune mauvaise intention, il n'a simplement pas compris que c'était mal de se servir dans les collets d'autrui, et la politique entre les clans lui passe au-dessus.

Visite au clan voisin

Jorunn, Sigurdr, Vigil, et éventuellement Hildr se rendent à Gunnvor, la cité du clan Arnkel - avec potentiellement Gnor Ygnarsson comme prisonnier. Ils vont le restituer s’il y a lieu, et demander réparation pour le préjudice. Ils sont accueillis dans la maison longue et pourront s’entretenir avec Ottar Stigsson, le jarl. S’ils ont amené le prisonnier, la preuve est suffisante, sinon Ottar sera dubitatif : un brigand pourrait avoir le même comportement. Il faudra beaucoup de conviction pour le pousser à mener une enquête. Mais en parlant autour d’eux, sur la base d’une description du gars, quelqu’un pourra dire “ça pourrait être le gars Gnor Ygnarsson !”. Sa balafre étant récente, peu de personnes l’ont vu ainsi (d’ailleurs, nul ne sait comment il s’est fait cette balafre, mais c’est probablement ridicule). Avec cet élément, ils pourront aller le voir et se confronter à lui, retourner vers Ottar.

Si cela se dénoue bien pour les PJ, ils vont revenir avec une compensation assez intéressante - Gnor a un talent extraordinaire pour le travail des peaux.

Agression sur la völva

Gorm Reidarsson est en train de boire avec son frère Eirik et quelques autres amis, dont Sigurdr, quand la conversation porte sur les jolies filles du clan. C'est là que Gorm décide d'aller déclarer sa flamme à Hildr et part en titubant.

Arrivé chez Hildr, l'haleine empuantie par l'alcool, il fait des avances bien lourdes. Si Hildr le repousse, il va se montrer de plus en plus collant, jusqu'à tenter de la prendre de force. Heureusement, entre-temps, Eirik sera en route pour le rejoindre, après avoir dit qu'il allait empêcher son frère de faire une bêtise. Sigurdr devrait être assez inquiet pour le suivre, sinon il sera attiré par des éclats de voix.

Assemblée du thing

Les actes qu'a tenté de commettre Gorm sont assez graves pour convoquer le thing pour le juger.

Conclusion

Je n'ai techniquement pas eu le temps de faire jouer les deux dernières scènes (elles suivaient la séance de création de perso). Mais la première était une excellente introduction à la campagne, tandis que Vigil et Hildr se disputent encore pour une vieille histoire de lapin...


Yoda

Les images sont tirées des films Star Wars épisode IV : un nouvel espoir, Shaun of the dead et Willow. Parce que la taverne, ça peut aussi être la cantina, le saloon, le bar, le Winchester...

À Nantes, nous avons un concept plus original que le cliché de la rencontre dans la taverne. En effet, au lieu d'infliger ce traitement aux PJ, on le fait aux joueurs ! C'est tous les 1er et 3e lundi du mois, à partir de 20h30 au Gigg's Irish Pub. Demandez le groupe de Bob ou criez "Initiative !" pour nous trouver. Vous serez les bienvenus !


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1 commentaire:

  1. Avec le dernier système de starwars, il propose de décrire la relation entre PJ par une petite phrase reliant 2 personnages.
    Simple, ça permet de donner une vision du rapport entre les PJs et un socle à une introduction.

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